Politique

Etat d’urgence sanitaire: A sens unique et…en pensée unique?

Intarissables débats sur les réseaux sociaux sur les mesures restrictives prises par le gouvernement muselant les émissions radiophoniques et télévisuelles. Apparemment, ce dernier veut travailler à sens unique et en pensée unique face à la crise sanitaire actuelle.

L’Etat ne ne veut ni écouter ni entendre des critiques, fussent-elles démocratiques et constructives, il mélange tout pour avoir une liberté d’agir et de « mâter », à sa manière, l’opinion. Mais il fallait se ressaisir, un début de dialogue, mais sans les représentants des médias proches de l’opposition, a eu lieu après que l’Ordre des journalistes, des membres de la société civile et au moins trois stations de radio et de télévision avaient déposé des requêtes auprès du Conseil d’Etat, afin de s’opposer à la décision gouvernementale de suspendre les émissions politiques sur les stations audiovisuelles privées.

Avec cette notion d’état d’urgence, tout est mélangé. Le concept de la liberté, la notion des prérogatives de la puissance publique, la théorie de la démocratie, la liberté d’expression, la liberté de la presse, etc. Le débat avait déjà commencé dans d’autres pays, plus développés, à plusieurs reprises. Universellement, « l’état d’urgence est une mesure prise par un gouvernement en cas de péril imminent dans un pays. Certaines libertés fondamentales peuvent être restreintes, comme la liberté de circulation ou la liberté de la presse », selon Wikipédia. C’est dans la façon d’appliquer une telle théorie que les débats se nourrissent.

Voici comment Vincent Sizaire, Maître de conférence associé, membre du centre de droit pénal et de criminologie, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières, analyse la situation : « D’une certaine façon, la création de l’état d’urgence sanitaire trahit l’incapacité à imaginer un mode de réponse à la crise sanitaire qui ne sacrifie pas – ou qui sacrifie moins – les libertés, alors que le caractère éminemment prévisible d’une pandémie permet de prendre des mesures visant à la prévenir bien plus en amont. (…) Par ailleurs les critères permettant de déclencher l’état d’urgence sanitaire sont trop extensifs. Sa mise en œuvre peut être décidée pour mettre fin à une catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population. Or la notion de «catastrophe» est des plus floues et, surtout, des plus subjectives » (The conversation, 6 avril 2020).

Cette notion de « prévisibilité », l’analyste de décrire : « Si l’on comprend l’intention d’établir un parallèle avec la notion de catastrophe naturelle, la comparaison ne résiste pas à l’analyse : contrairement à cette dernière, une crise sanitaire est prévisible. Si la survenance d’un nouveau virus ne peut être réellement anticipée, tel n’est pas le cas de l’épidémie qui en résulte. Ainsi dès le début du mois de janvier, le risque d’une pandémie était parfaitement identifié. En outre, une crise sanitaire met en jeu de façon beaucoup plus importante le facteur humain».

A Madagascar, l’on ne peut s’empêcher de rappeler que le gouvernement a déjà été alerté par l’opinion pour la possible venue d’une deuxième vague de virus, déjà au mois de décembre 2020, et en janvier 2021. Mais tout le monde s’en rappelle, le ministre de la Santé publique avait toujours une réponse très « rassurante ». Résultat : bon nombre de citoyens ont oublié de se protéger, les mesures tendant à sanctionner les défaillants se sont ramollies. Et l’on serait amené à croire que l’entrée d’un variant à Madagascar aurait servi, au ministère de la Santé, d’une excuse.

L’on ne comprend pas pourquoi l’Etat a dicté la suspension de ces différentes émissions dont la plupart n’ont pas vocation à perturber, loin de là, les actions gouvernementales. Alors même que les politiciens, les membres de la Société civile, les médecins, les étudiants, et le secteur privé, pourront quand même s’exprimer durant le journal parlé des radios ou encore pendant les journaux télévisés. Une décision bancale donc, qui ne vise que l’opposition, laquelle émet ses idées dans des émissions plus suivies et plus cadrées.

Le musellement à l’encontre de l’opposition a commencé par cette décision bizarre de réduire le nombre de téléspectateurs de la MBS en la privant d’être diffusée par satellite, alors que la diffusion analogique continue toujours d’être opérationnelle. En définitive, le pouvoir donne l’impression de ne pas supporter les critiques quant à sa manière de gouverner face à la crise sanitaire. Il renvoie une image de panique si tant est que la situation le dépasse. Ou tout simplement, il voudrait gouverner à sens unique, en pensée unique.

 

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