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Mouvements fiévreux : L’état de grâce se trouve à son terme

Un peu moins de deux ans après son élection, le président Andry Rajoelina commence à ressentir la fin de l’état de grâce.

Des signes se profilent à l’horizon, pour ne pas dire des symptômes, caractéristiques d’un glissement politique défavorable pour le régime. Car, il faut le dire, des « petits » mouvements de contestation s’immiscent tout doucement dans le microcosme politique, lesquels ne se présentent pas comme « graves » ni « dangereux », pour le moment, à l’encontre du régime, mais s’apparentent plutôt à des manifestations de frustration et d’énervement.

D’une part, la tension au sein des deux assemblées, Tsimbazaza et Anosikely, a ouvert la voie à la mise en place d’une petite plateforme d’élus qui a pris l’initiative d’utiliser les voies juridiques pour faire valoir sa « lutte pour la démocratie ». D’autre part, un rassemblement de partis politiques et d’élus a fait une déclaration à la nation pour certifier que leur mouvement ne s’arrêtera plus que lorsque cette entorse à la démocratie cesse. Ces deux regroupements, pour le moment de circonstance, œuvrent ainsi à travers la brèche qui leur soit offerte par les agissements des tenants du pouvoir ces derniers mois sur le plan purement politique. En même temps, ils dénoncent le « forcing » pour la tenue des élections sénatoriales, selon eux, « à visée politique qui risquent de biaiser la démocratie à Madagascar ».

Les signes de la fin de l’état de grâce se sont aussi révélés au cours de ces derniers mois de confinement- qui ne portait vraiment pas son nom – avec ces mouvements de foules mécontentes où l’on entendait des gens crier : « nous avons regretté de l’avoir élu ».

Ceux qui ont vraiment élu l’actuel Président ont eu le goût amer de constater que deux ans après, leur vie n’a changé d’un iota. Pire, les conditions sociales dans lesquelles ils vivent demeurent chaotiques. Etrangement, ils ne se sentent pas concernés par ces projets d’infrastructures grandioses annoncés ici et là. Ils aspirent plutôt à des emplois, à des activités génératrices de revenus, à des logements dignes et décents, à une lutte plus efficace contre l’insécurité. Bref, à une politique sociale plus affirmée. On voit de moins en moins dans la rue la couleur orange à gogo arborée par des concitoyens enthousiastes, fiers d’avoir un « nouveau » président, autant les t-shirts s’usent, d’ailleurs, autant la foi s’estompe.

Ce sentiment gagne aussi les électeurs d’Antananarivo, surtout pour ceux qui ont eu l’audace de voter pour le Maire de la capitale, mais qui se trouvent un peu surpris par les décisions prises par ce dernier. Une confiance hésitante pour ne pas dire chancelante qui risque aussi d’atteindre certains habitants de la ville de Fianarantsoa s’opposant aux décisions prises par les responsables municipaux.

Sur le plan économique, après une période de léthargie un peu longue, le secteur privé se réveille aussi progressivement. Notamment pour défendre le droit des travailleurs, le GEM (Groupement des Entreprises de Madagascar) et le GEFP (Groupement des entreprises franches de Madagascar) ont émis des remarques logiques et pertinentes, réagissant à la fermeture de l’entreprise Triple AAA. Le secteur privé a notamment souligné que la raison fiscale ne devrait pas être un motif de fermeture d’une entreprise. Pour eux, « la priorité en ce moment est de soutenir les entreprises, peu importe son propriétaire, afin de maintenir l’emploi », comme l’a affirmé la présidente du GEFP. Cette fin de l’état de grâce rend le gouvernement un peu crispé, l’exposant à plus d’affront, et le mettant devant ses responsabilités. Mais ce sont des signaux qui alertent plutôt qu’alarmants.

L’Exécutif semble ainsi entamer une nouvelle ère. Plus de chèque en blanc, ni de carte blanche. Même certains fervents défenseurs de l’avènement orange restent discrets. Les affaires rendant certains ministres vulnérables n’ont pas favorisé l’impulsion d’une nouvelle image, plus luisante. Ni le dernier remaniement, d’ailleurs. Et à l’approche des sénatoriales dont les résultats sont prévisibles avec cette ossature Mapar au sein des grands électeurs, le régime aura besoin d’un fort soutien de ses partisans car, le vent ne soufflera toujours pas de son côté.

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