Politique

Délivrance de CTA: La crédibilité de l’ACM menacée

Deux personnes viennent d’être mises sous mandat de dépôt pour une suspicion de corruption liée la délivrance de Certificat de transport aérien (CTA). Mais cette affaire peut cacher des dessous politiques qui risquent de nuire gravement à la crédibilité de l’ACM.

2016, sous le régime Rajaonarimampianina, la compagnie Madagasikara Airways décroche son Certificat de transport aérien (CTA) et devient un concurrent d’Air Madagascar sur le réseau intérieur. Décembre 2019, l’Aviation civile de Madagascar (ACM) à travers la direction de la supervision de la sécurité décide de renouveler cette autorisation qui lui permet de poursuivre ses activités. C’est Tovo Rabemanantsoa, le directeur général nommé par le régime Rajoelina, qui signe le document officiel y afférent. Quelques temps après, pour des raisons inconnues, il décide de faire volte-face et lance une investigation qui « visait à déceler des anomalies dans les dossiers que cette direction avait traités». Evidemment, celui relatif à Madagasikara Airways figure en tête de liste.

Comme attendue, « l’opération » a visiblement porté ses fruits puisqu’une quarantaine d’acteurs issus de ce secteur ont comparu devant le Pôle anticorruption (PAC), la semaine dernière. Selon nos informations, ils étaient entendus sur des dossiers impliquant des responsables de l’Aviation civile de Madagascar (ACM) et de quelques compagnies aériennes.

Deux personnes ont été placées en détention préventive et plusieurs autres mises en liberté provisoire à l’issue de leur déferrement au parquet du PAC. Et chose logique, le directeur général qui était à l’origine des investigations figure également parmi les personnes inculpées dans cette affaire. Etant les signataires des fameux CTA, sa situation semble être compliquée et c’est même un miracle qu’il ait pu échapper à la prison.

C’est d’ailleurs une des faits qui soulèvent des doutes quant au réel dessous de cette histoire. Pourquoi le directeur général a décidé de son propre chef de lancer une investigation sur une affaire dans laquelle il risque de le nuire également ? Avait-il réellement suspecté des failles dans le fonctionnement de son service ou aurait-il subi une pression politique en délivrant son CTA à Madagasikara Airways ? Cette dernière qui a vu le jour sous le régime précédent est d’ailleurs réputé comme appartenant à un proche de l’ancien président. Par ailleurs, à souligner également qu’une autre compagnie privée lorgne sur les vols intérieurs réguliers et que deux concurrents face à Tsaradia pourraient être jugées comme de trop.

Dans tous les cas, c’est la crédibilité de l’ACM qui est menacée. La réforme du texte régissant cette autorité avait été une des conditions imposées par les Européens pour la levée de la liste B qui interdisait les avions d’Air Madagascar de voler dans le ciel européen. Une des garanties demandée a été justement l’indépendance et la transparence des procédures de contrôle et d’octroi des diverses autorisations touchant le secteur aérien. Et ce genre de fait ne manquerait sans doute pas d’attirer l’attention de l’OACI et du monde de l’aviation civile internationale. De l’autre côté, s’il s’agissait véritablement de problème au sein de cette direction particulièrement sensible, les conséquences risquent d’être aussi dangereuses pour le secteur aérien malgache.

D’ailleurs, l’investigation commandée par le directeur général avait déjà été vivement contestée par les employés de l’ACM qui estimaient que ceux qui avaient été chargés de la mener n’avaient pas d’expérience en matière de certification aéronautique. Mais cette situation ne semble pas avoir « perturbé » outre mesure le PAC. Affaire à suivre.

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